496 milliards de dollars, c’est ce que 134 pays pauvres ont transféré vers les pays riches en 2017. Durant la même année, ils ont reçu 97 milliards de dollars d’aide publique au développement, soit cinq fois moins.

C’est l’ONU elle-même qui dénonce cette situation surréaliste dans une analyse datant de 2020. Le record absolu a été atteint durant la crise économique de 2008 avec plus de 900 milliards remontant au Nord pour environ 90 milliards d’aide publique au développement.

L’ONU y décrit une faillite structurelle des flux financiers internationaux creusant sans cesse la dette des pays du Sud. Ainsi ceux-ci, important toujours plus qu’ils n’exportent, doivent compenser en s’endettant. Cette dette s’accumule d’année en année, poussant à rembourser toujours plus d’intérêts et creusant encore davantage leur balance des paiements.

En 2020, les pays les plus pauvres ont atteint une balance de paiements négative de 100 milliards de dollars. Ils ont donc creusé leur dette d’autant. Selon le CADTM, l’Afrique devait 770 milliards de dollars à ses créanciers en 2018. La solidarité avec les pays pauvres ne se mesure donc pas à l’aune du montant d’aide publique au développement. Mais elle nécessite de revoir largement les pratiques commerciales, fiscales et de gouvernance à travers le monde.

Les fonds vautours, la nouvelle actualité de la dette

En 2004, la société « FG Hémisphère » rachète une ancienne dette contractée dans les années 80 par la SNEL (Société Nationale d’Electricité) sous la dictature de Mobutu. A l’origine, cette créance était détenue par une entreprise yougoslave, Energoinvest, et valait 18 millions de dollars. Mais quelques années plus tard, FG Hémisphère obtient des tribunaux le droit de se faire rembourser
plus de cinq fois le montant initial
. Une cour de justice américaine condamne la République Démocratique du Congo à verser à FG Hémisphère 104 millions de dollars. Celle-ci arrive à récupérer son argent via un tribunal sud-africain qui autorise un prélèvement directement sur les ventes d’électricité de la SNEL à l’Afrique du Sud.

Cette histoire est typique de ce qu’on dénomme désormais les « Fonds Vautours ». Il s’agit d’entreprises qui se sont spécialisées dans le rachat à prix très bas de dettes pourries et qui via des tribunaux contraignent l’Etat endetté à rembourser sa dette très largement majorée. Ce phénomène est en extension depuis 20 ans car ces fonds profitent d’un relatif renforcement de la solvabilité des Etats pauvres leur facilitant le remboursement.

Ciblant jusqu’alors presque uniquement les pays du Sud, la crise économique de 2008 leur a fourni de nouvelles victimes potentielles telles que la Grèce. Cette tendance a poussé la Belgique à légiférer afin de plafonner les plus-values de ces fonds et de rendre ainsi leur système d’extorsion inopérant sur son territoire. Mais le paradis des Fonds Vautours reste les Etats-Unis où une loi s’y opposant a été tuée dans l’œuf… le dirigeant d’un des principaux fonds vautours, NML Capital, étant l’un des principaux bailleurs de fonds du Parti Républicain.

© illustration : Yakana

Pour en savoir davantage sur les fonds vautours, on vous invite à écouter Renaud Vivien, coordinateur pour Entraide et Fraternité :


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de ce numéro #14
d’Autre Terre Magazine
qui parle du vol économique des pays du Sud.

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